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  • Aymeric Galpon

Chronique live par Franck Halimi

Chers amis,

En direct-love du club de La Vapeur de Dijon (21), pour l’étonnant spectacle du trio Benoît Keller (contrebasse, guitare, viole de gambe, bouzouki, effets), Aymeric Descharrières (saxophone soprano, ewi, voix mégaphonique, effets) & Denis Desbrières (batterie, effets), intitulé « Explicit Liber » (jazz contestataire), programmé par les amis de Média Music, dans le cadre de D’Jazz Kabaret.

On connait bien ces formidables musiciens depuis belle lurette et on les a appréciés dans moult concerts et spectacles. Mais, là, le concept est vraiment surprenant et stimulant. Le cinquantenaire de Mai 68 est l’occasion pour le trio de célébrer le moteur à explosion et shaker à idées que furent les événements et pensées d’alors.

Ça commence, scène vide, par « L’Internationale » et par des slogans de manif enregistrés. Et puis, les musiciens arrivent et installent une musique où la liberté d’un jazz saxophonique en fusion vient se brûler les zèles à une rythmique limite rock qui n’en demandait pas tant.

L’une des belles idées de ce moment intense est, entre les morceaux instrumentaux, de laisser parler les protagonistes de l’époque, qu’ils soient anonymes de la rue, vedettes (Sartre, Cohn-Bendit, De Gaulle, Georges Ségui,…) ou journalistes (Elkabach, Bourret, Schneider,…), dans un dispositif scénique original où tournent des magnétos à bande vintage.

Et qu’elle bastonne ou qu’elle s’envole avec lyrisme, la musique est toujours juste, dans le sens où elle raconte -avec ferveur ou avec douceur- les doutes, les turbulences et les enthousiasmes d’alors. Ici, tout est cash et sans faux semblants : ça joue une musique sincère ayant su s’affranchir du collier des conventions et caricatures faciles liées aux idées reçues sur ce véritable moment de notre histoire contemporaine.

Et en ce mi-centenaire, où on entend tout et n’importe quoi sur Mai 68, qu’est-ce ça fait du bien de l’envisager de la sorte ! Benoît Keller, Aymeric Descharrières & Denis Desbrières nous racontent une histoire passionnée et passionnante avec une liberté, une fraîcheur et une originalité qui nettoient les oreilles et flattent l’esprit comme rarement.

On se rappelle les slogans qui fleurissaient alors, tels que « Cours, camarade, le vieux-monde est derrière toi ! ». Hé bien, le trio parvient avec brio, au travers d’une musique sans frontière (du baroque délicat au rock primitif, en passant par un jazz tribal), à imager ces slogans musicalement et à les faire résonner et raisonner à nos sens flattés et ravis.

Au point qu’ils nous entraînent dans leur folle sarabande manifestive et qu’on défile volontiers avec eux, le mégaphone (pas aphone du tout) à la main droite et le poing gauche levé, vers des lendemains plus lumineux.

Avec l’énergie de l’espoir…

Franck Halimi